
La lente érosion de l’accès aux droits en France
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Ce ne sont pas moins de 93 % des recours devant la Défenseure des droits qui ont été jugés recevables en 2024. Que l’on parle de contrôle de l’immigration, d’encadrement des pratiques médicales pour les mineurs en questionnement de genre, de protection des usagers des services publics, d’accès à des logements abordables, d’errances de lycéens en recherche de lycées, de maintien des droits fondamentaux face à des catastrophes naturelles ou encore d’expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique, la question de la préservation des droits est partout, tout le temps. Et donc éminemment sensible.
En matière de discriminations, après le handicap, l’origine constitue le deuxième critère invoqué par les réclamants – avec une part qui a augmenté de 2 points entre 2023 et 2024.
Les services publics, responsables de ruptures
La Défenseure des droits s’est également intéressée aux privations et aux différentes formes de non-respect des droits. L’éloignement avec les services publics – en raison de la dématérialisation des procédures et du recul des accueils physiques – est la principale cause de réclamation en 2024. Et ce sont surtout les droits sociaux (pensions de vieillesse, prestations familiales, assurance maladie, etc.), les droits des étrangers et les difficultés d’accès à l’état civil qui génèrent le plus de tension.
Plus précisément, pour pallier la complexité des démarches et ne pas porter préjudice aux droits sociaux qui en dépendent, la Défenseure des droits demande que les usagers puissent « interagir avec l’administration par plusieurs canaux, et pas seulement via le numérique », préconisant notamment que des représentants des services publics soient présents physiquement dans les espaces France services.
La situation est encore plus délicate du côté des droits des étrangers. Plateforme en ligne régulièrement défaillante qui engendre des conséquences dramatiques, ou encore renouvellement des titres de séjour : ces problématiques représentent plus d’un tiers des réclamations en 2024.
S’agissant de l’accès aux informations d’état civil, de filiation, de permis de conduire, là aussi la situation est critique : des retards dans les décisions – quand elles ne sont pas contradictoires – et des irrégularités dans le traitement des dossiers sont notamment observés. La Défenseure des droits appelle ainsi à « une meilleure coordination entre préfectures, forces de l’ordre et autorités médicales ».
Personnes détenues et mineurs, des catégories non épargnées
Sur les déclarations traitées, nombre d’entre elles concernent également les personnes détenues, exposées à des atteintes structurelles (surpopulation carcérale, accès aux soins, etc.), ainsi que les droits des mineurs, qui soulèvent des préoccupations liées à l’éducation, la protection de l’enfance et des mineurs non accompagnés, la santé et le handicap.
Enfin, le rapport annuel 2024 évoque certains « risques émergents », comme l’intelligence artificielle et l’environnement, évoquant la mise à mal des droits fondamentaux de l’enfant « face à la gravité des risques que font courir les dégradations environnementales » sur les enfants.
Noélie Coudurier