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16/11/2023
3 minutes
Droit public

Protection de l’environnement : les associations à la manœuvre

Pour assurer la protection de l’environnement, la voie judiciaire n’est pas la moins pertinente. Compte tenu de leur expertise, ce sont généralement les associations de protection de l’environnement qui sont à la manœuvre. Mais ce ne sont pas les seules. Les associations représentant les collectivités ont également leur rôle à jouer. Deux affaires récemment jugées l’illustrent.

Annulation de l’autorisation de « mégabassines »

Le tribunal administratif de Poitiers, saisi par plusieurs associations, a annulé deux arrêtés préfectoraux autorisant la création et l’exploitation de quinze réserves de substitution. Les réserves de substitution, plus connues sous le nom de « mégabassines », sont des réserves d’eau destinées à être remplies pendant la période hivernale, lorsque la ressource est plus importante, pour servir à l’irrigation pendant la période estivale, lorsque la ressource est limitée. Le premier arrêté autorisait la création de neuf réserves de substitution d’un volume total de 1,64 million de mètres cubes sur les sous-bassins de l’Aume et de la Couture, dans le nord du département de la Charente et le sud du département des Deux-Sèvres. Le second arrêté autorisait la création de six réserves de substitution d’un volume total de 1,48 million de mètres cubes sur le sous-bassin de La Pallu, dans la Vienne. Dans les deux cas, le tribunal a estimé, à titre principal, que les projets étaient surdimensionnés. Dans la première affaire – et seulement elle –, la préfète du  département des Deux-Sèvres a contesté l’intérêt à agir des associations requérantes, à savoir plusieurs associations environnementales et une association de protection du patrimoine. Si l’intérêt à agir des premières ne souffre aucune contestation compte tenu de leur objet, la réponse est moins évidente en ce qui concerne la seconde. D’où une confrontation, par le tribunal, de l’objet poursuivi par cette association à l’objet de sa demande. Le tribunal relève que l’association a pour objet statutaire « de protéger le patrimoine du Pays d’Aigre et du Nord Charente contre les menaces de pollution, de modifications profondes ou de déstructuration de ses particularités et de ses richesses naturelles et architecturales ». Il ajoute que les réserves de substitution litigieuses, dont sept seraient implantées dans le nord de la Charente, étant susceptibles de porter atteinte, notamment, aux paysages et aux milieux naturels de ce territoire, l’Association protection et avenir du patrimoine en Pays d’Aigre (Apappa) justifie d’un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation de l’arrêté attaqué. Sur le fond, c’est un succès éclatant pour les associations requérantes. Comme l’affirme le blogueur avocat maître Eolas, dans une critique à peine voilée des pratiques des Soulèvements de la Terre, « un bon recours juridique, ça marche mieux que jeter des pavés sur les gendarmes ». À condition – mais c’est ici le cas – qu’il repose sur un argumentaire solide.

Annulation du décret sur l’artificialisation des sols

Saisi par l’Association des maires de France (AMF), le Conseil d’État a partiellement censuré le décret n° 2022-763 du 29 avril 2022 (JO du 30) relatif à la nomenclature de l’artificialisation des sols pour la fixation et le suivi des objectifs dans les documents de planification et d’urbanisme. Il s’agit du dispositif réglementaire d’application de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 (JO du 24) portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui impose la réduction de l’artificialisation des sols. Le Conseil d’État censure ce dispositif sur un point particulier lié à la définition des zones artificialisées : la loi de 2021 impose, en effet, au gouvernement de préciser à quelle échelle les zones artificialisées doivent être identifiées, mais le décret contesté ne comportait pas les précisions nécessaires. L’État, défendeur à l’action, n’a ici nullement contesté l’intérêt à agir de l’AMF. Une telle démarche eut de toute façon probablement été vaine eu égard à l’objet statutaire de l’association qui est, entre autres, de défendre les intérêts des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans toute leur diversité.

Sources