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Enfance : protection rapprochée !
03/03/2022
5 minutes
Juridique

Enfance : protection rapprochée !

La loi relative à la protection des enfants a été publiée au Journal officiel. Elle réforme en de nombreux points le secteur. Présentation des sept grands axes.

Améliorer le quotidien des enfants protégés

Avant de prévoir une mesure de placement à l’aide sociale à l’enfance (ASE), la possibilité de confier un enfant à un membre de la famille ou à un tiers digne de confiance devra désormais être systématiquement recherchée.

Est consacré le principe de l’interdiction de séparation des fratries. Ainsi, sauf si son intérêt commande une autre solution, l’enfant ne sera plus séparé de ses frères et sœurs.

D’ici à février 2024, l’hébergement à l’hôtel de mineurs et jeunes majeurs (âgés de moins de 21 ans) confiés à l’ASE sera interdit. Dans l’intervalle, aucun enfant ne pourra être hébergé plus de deux mois à l’hôtel (résidence hôtelière à vocation sociale) ou dans un établissement accueillant des mineurs.

Le régime de l’autorisation est étendu aux établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) qui accueillent ponctuellement des mineurs et jeunes majeurs dans le cadre de la protection de l’enfance. Par ailleurs, une nouvelle catégorie d’ESSMS est créée : les « établissements ou services mettant en œuvre des mesures d’évaluation de la situation des personnes se présentant comme mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille ». À noter également que les ESSMS relevant de la protection de l’enfance sont invités à conclure des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM).

Devra être systématiquement proposée à l’enfant pris en charge par le service de l’ASE, quel que soit le fondement de cette prise en charge, la désignation d’un ou plusieurs parrains ou marraines dans le cadre d’une relation durable coordonnée par une association et d’un mentor pour l’enfant accueilli à l’ASE.

Un accompagnement pour les 18-21 ans est garanti afin de mettre fin aux sorties « sèches » de l’ASE à la majorité. Le principe du « droit au retour » à l’ASE est également consacré. De plus, les jeunes sortants de l’ASE sont désormais prioritaires pour l’attribution d’un logement social durant les trois ans suivant le dernier jour de leur prise en charge à l’ASE.

Le contrat d’engagement jeune – qui remplace la garantie jeunes depuis le 1er mars 2022 – devra être systématiquement proposé aux jeunes majeurs confiés à l’ASE ou à une association habilitée de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) qui ne font plus l’objet de suivi éducatif après leur majorité et qui ont besoin d’un accompagnement.

Six mois après sa sortie de l’ASE, un entretien devra obligatoirement être organisé avec le majeur ou mineur émancipé pour faire un bilan de son parcours et de son accès à l’autonomie.

Enfin, le juge des enfants a désormais la possibilité d’autoriser la personne, le service ou l’établissement accueillant l’enfant à exercer « un ou plusieurs actes déterminés relevant de l’autorité parentale » dans tous les cas où l’intérêt de l’enfant le justifie ou lorsque les détenteurs de l’autorité parentale « sont poursuivis ou condamnés, même non définitivement, pour des crimes ou délits commis sur la personne de l’enfant ».

Mieux protéger les enfants contre les violences

Une nouvelle mission relève du champ de l’ASE : « apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique au mineur qui se livre à la prostitution, même occasionnellement, réputé en danger ».
Les personnes condamnées pour infractions sexuelles ne pourront exploiter, diriger, intervenir ou exercer une fonction permanente ou occasionnelle, à quelque titre que ce soit, y compris bénévole, dans des établissements, services ou lieux de vie et d’accueil pour mineurs. Il sera procédé au contrôle systématique des antécédents judiciaires des professionnels et bénévoles avant l’exercice des fonctions et à intervalles réguliers lors de leur exercice.

L’agrément d’assistant maternel ou d’assistant familial ne sera pas accordé si l’une des personnes majeures ou mineures âgées d’au moins 13 ans vivant au domicile du demandeur, lorsque ce domicile est le lieu d’exercice de sa profession, à l’exception de celles accueillies en application d’une mesure d’ASE, est inscrite au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.

Tous les ESSMS devront préciser dans leur projet définir une politique de prévention et de lutte contre la maltraitance et désigner une autorité extérieure à laquelle les personnes accueillies peuvent faire appel en cas de difficulté.

La maltraitance, qui est érigée en véritable principe guidant l’action sociale et médico-sociale, dispose désormais d’une définition légale.
Les signalements des faits de violences devront désormais être réalisés sur la base du référentiel national d’évaluation des situations de danger ou de risque de danger pour l’enfant.

Améliorer les garanties procédurales en matière d’assistance éducative
Si la particulière complexité d’une affaire le justifie, le juge des enfants pourra, en matière d’assistance éducative, à tout moment de la procédure, ordonner son renvoi à la formation collégiale du tribunal judiciaire, qui statuera comme juge des enfants.

De plus, la parole de l’enfant sera davantage prise en compte puisque le juge des enfants devra systématiquement effectuer un entretien individuel avec l’enfant capable de discernement lors de son audience ou de son audition. Et lorsque l’intérêt de l’enfant l’exige, le juge des enfants demandera la désignation d’un avocat pour l’enfant capable de discernement et d’un administrateur ad hoc pour l’enfant non capable de discernement.

Enfin, en cas de changement de lieu de placement de l’enfant, le service départemental de l’ASE devra systématiquement en informer le juge des enfants afin que celui-ci puisse notamment vérifier si ce changement est bien dans l’intérêt de l’enfant.

Améliorer l’exercice du métier d’assistant familial

Le métier d’assistant familial (famille d’accueil) est sécurisé, notamment grâce au bénéfice d’une rémunération garantie, d’une indemnité en cas d’accueil d’un nombre d’enfants inférieur à celui prévu par le contrat de travail, d’un week-end de repos par mois non imputé sur les congés payés.

En cas de retrait d’un agrément à un assistant familial motivé par la commission de faits de violences à l’encontre des mineurs accueillis, il ne pourra être délivré un nouvel agrément avant l’expiration d’un délai approprié, et ce quel que soit le département dans lequel la nouvelle demande est présentée. Dans ce cadre, un fichier national recensant les agréments des assistants familiaux ainsi que les suspensions et les retraits d’agréments est créé. Cette base recense également ceux des assistants maternels.

Renforcer la politique de protection maternelle et infantile
Les services de protection maternelle et infantile (PMI) sont renforcés dans leur rôle d’acteur charnière en matière de santé publique. Des priorités pluriannuelles d’action en matière de protection et de promotion de la santé maternelle et infantile seront fixées par le ministre chargé de la santé. De plus, les missions des services de PMI sont actualisées et les normes minimales dans lesdits services sont modifiées.

Mieux piloter la politique de protection de l’enfance

Le périmètre du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) est revu. Composé notamment – concernant le volet associatif – de représentants des associations gestionnaires d’établissements ou de services de l’ASE, d’associations et d’organismes œuvrant à la protection des droits des enfants et de représentants d’associations de personnes accompagnées, il « émet des avis et formule toutes propositions utiles relatives à la prévention et à la protection de l’enfance. Il est notamment consulté sur les projets de textes législatifs ou réglementaires portant à titre principal sur la protection de l’enfance ».

Est par ailleurs créé un groupement d’intérêt public pour la protection de l’enfance, l’adoption et l’accès aux origines personnelles. Il exercera des missions d’appui aux pouvoirs publics dans la mise en œuvre de la politique publique de protection de l’enfance, d’adoption nationale et internationale.

Mieux protéger les mineurs non accompagnés (MNA)

Les critères de répartition des MNA sur le territoire sont modifiés. Aux critères démographiques et d’éloignement géographique sont ajoutés les spécificités socio-économiques des départements et le nombre de MNA devenus majeurs pris en charge par l’ASE.

Par ailleurs, en cas de réorientation du MNA dans un nouveau département, il sera désormais interdit de réévaluer sa minorité et son état d’isolement.

Enfin, les départements devront recourir au fichier d’aide à l’évaluation de la minorité et enregistrer les personnes se déclarant comme MNA sauf lorsque la minorité est manifeste. Et, au risque de se voir retirer la contribution forfaitaire de l’État, les départements transmettront tous les mois au préfet leurs décisions relatives à l’évaluation des personnes se déclarant MNA.

Sources