Suivez l’actualité juridique M’inscrire à la newsletter
17/01/2024
2 minutes
Droit public

Cercle restreint de personnes : vers une évolution de sa définition ?

À titre liminaire, rappelons que pour bénéficier du régime du mécénat, les associations doivent notamment satisfaire aux conditions d’intérêt général requises par les articles 200 et 238 bis du code général des impôts (CGI), ces conditions étant remplies si la gestion de l’association est désintéressée, si ses activités présentent un caractère non lucratif au sens fiscal et si elle ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes.

De l’interprétation du cercle restreint de personnes

Cette affaire opposait l’Association nationale des retraités de la police (ANRP) à l’administration fiscale, celle-ci ayant refusé de reconnaître à la première le caractère d’organisme d’intérêt général au motif que son activité ne bénéficie qu’à un cercle restreint de personnes.

Le but de l’association est « de défendre les intérêts moraux et matériels de ses adhérents et de renforcer le lien intergénérationnel entre actifs et retraités ». Parmi ses missions, elle réalise de nombreuses actions d’entraide et de secours notamment grâce à une caisse de solidarité alimentée par les dons des adhérents.

Le tribunal administratif de Paris juge pour sa part, après avoir constaté le caractère désintéressé de la gestion de l’association et la non-lucrativité de ses activités, que l’association présente bien un caractère d’intérêt général, permettant son éligibilité au régime du mécénat :

–  tout d’abord, il estime que le fait que « l’association ne s’adresse qu’à des bénéficiaires définis par leur appartenance à une catégorie professionnelle déterminée et réserve le bénéfice de ses prestations à ses adhérents» ne s’oppose pas au caractère d’intérêt général de l’association, remettant ainsi en cause la doctrine fiscale et même la jurisprudence antérieure, plus restrictive, sur la notion de « cercle restreint de personnes » ;

–  il précise ensuite que les actions de soutien financier aux membres actifs présentent un caractère social et sont exercées de façon prépondérante par l’association, sans « que n’y fassent obstacle les circonstances que ces aides soient réservées aux seuls membres actifs de l’association ».

Vers une évolution de l’éligibilité au régime du mécénat ?

Il est intéressant de noter que le tribunal invite l’administration fiscale à ne pas se borner à l’examen des statuts, mais à prendre en considération, in concreto, « l’ensemble des éléments relatifs à l’objet social de l’association, ses activités et son public », rejoignant ainsi la propre méthodologie de l’administration sur le faisceau d’indices. Mais surtout, en l’espèce, le fait que l’association regroupe des membres exerçant ou ayant exercé des fonctions régaliennes les exposant à des risques particuliers a été relevé, de manière pragmatique, par le juge pour retenir que ces actions d’entraide revêtent un caractère particulier dans ce contexte.

Soulignons, par ailleurs, qu’une autre décision encore plus récente du même tribunal (TA Paris, 9 nov. 2023, no 2118804) retient la même analyse assez large sur le caractère social d’une association gestionnaire d’une « caisse de solidarité et de soutien d’étudiants et travailleurs en grève reconductible, ou de toutes personnes victimes de discrimination », ce qui semble là aussi constituer, au moins de manière indirecte, une certaine ouverture sur la notion de cercle restreint.

Alors, cas d’espèce ou véritable évolution ? Affaire à suivre si l’administration fait appel…

Diane Colombani
Juriste, Delsol avocats

Sources