
Politique de la ville : entre nivellement et reconnaissance des particularités
« Plus loin, plus vite, plus fort » : tel est le leitmotiv que s’est donné le gouvernement en matière de politique de la ville lors du Comité interministériel des villes (CIV) qui s’est tenu début juin à Montpellier.
Avec l’intention de ne pas faire apparaître les quartiers prioritaires comme les parents pauvres de l’engagement gouvernemental, trois axes de travail ont été identifiés : assurer l’égalité des chances pour les enfants et les jeunes de quartiers prioritaires, assurer la tranquillité publique, faciliter l’insertion professionnelle et stimuler l’économie.
Le Comité interministériel a d’abord présenté un bilan d’étape, puis décliné les prochaines priorités de travail.
Encourager l’équité républicaine
À la fois singuliers et en quête des mêmes droits et opportunités que le reste des territoires français, les 1 609 quartiers prioritaires de la ville (QPV) réunissant 6 millions de Françaises et Français (dont 40 % ont moins de 25 ans) sont à la croisée du travail que mènent les services de l’État, les élus, les associations, les acteurs économiques, les financeurs et font l’objet de la plus grande attention des habitants.
Malgré les effets d’annonce réguliers, des difficultés structurelles demeurent dans ces quartiers. Le rapport du CIV rappelle que 24 % des enfants provenant d’un QPV ont déjà redoublé à leur arrivée en 6e (contre 9 % pour les enfants vivant dans d’autres territoires), mais également que 40 % des jeunes de moins de 25 ans sont sans diplôme et que le taux d’emploi y est plus faible que la moyenne nationale, avec des métiers qui sont sous-représentés.
Afin d’y remédier en partie, 40 nouvelles cités éducatives ont vu le jour en 2025 pour accompagner les enfants et les jeunes de la petite enfance à leur insertion professionnelle, un tissu associatif dense est encouragé (3 000 associations ont bénéficié d’une sécurisation de leurs financements en 2023), notamment via les contrats de ville Engagements quartiers 2030 (333 signés en 2024), et davantage d’entreprises se sont implantées dans ces quartiers, faisant un bond de 43,2 % entre 2017 et 2021. Le rapport est en revanche plutôt discret sur les indicateurs qualitatifs.
Comme le laisse entendre le CIV, un équilibre est donc à trouver entre faire en sorte que chacun compte quel que soit le lieu où il a la chance de vivre, d’une part, et tenir compte des spécificités de ces quartiers et de leur population, d’autre part.
Enfance, tranquillité publique et économie : la prochaine feuille de route
La politique de la ville des prochaines années s’axera donc autour de trois thématiques principales « en vue de garantir l’égalité des chances et la pleine participation de tous à la vie de la Nation ». La première concerne l’épanouissement et l’émancipation des enfants et des jeunes des QPV. Pour cela, le CIV envisage de permettre l’éclosion de 40 nouvelles cités éducatives, de doubler les objectifs de scolarisation des enfants de moins de 3 ans dès 2026 et de créer 100 crèches, ou encore de proposer un accueil psychologique pour prendre en charge les problématiques de santé mentale dans les familles.
Ce sont ensuite les enjeux de sécurité qui ont été ciblés, notamment en s’engageant à résoudre les difficultés d’entretien des parties communes avec les bailleurs d’ici à 2026, à restaurer la confiance entre la population, les institutions et la police grâce au doublement des délégués à la cohésion police-population d’ici à 2027 ou encore à proposer des lieux de stage d’internat pour les médecins juniors.
Enfin, l’accent sera mis aussi sur l’économie via l’accélération de la création d’entreprises, en particulier pour les femmes, la création d’un accompagnement personnalisé pour 100 000 demandeurs d’emplois issus des QPV et l’élaboration d’incitations fiscales propres pour attirer les investissements privés.
Sur le papier, tout y est ou presque (indicateurs de suivi, enveloppes budgétaires, etc.). Reste désormais à s’assurer que les intentions d’« aller vers » et de « faire avec » les habitants des QPV se transforment en réalité.
Noélie Coudurier